Expropriation et JO 2024 : expropriation sans indemnité juste et préalable ?

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Expropriation et JO 2024 : expropriation sans indemnité juste et préalable ?

Expropriation pour les JO 2024. Nos explications et Nos conseils.

 

Explications :

Les JO 2024 sont la grande affaire des collectivités publiques et des aménageurs de la Région Parisienne pour les 5 prochaines années. Réaliser les aménagements pour les JO (Village Olympique équipements sportifs, transports etc.) nécessite de prendre possession rapidement des terrains nécessaires. L’obstacle juridique principal : le droit de propriété garanti par la Constitution à l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Cet article prévoit que l’expropriation ne peut intervenir que lorsque l’utilité publique a été déclarée et sous condition d’une juste et préalable indemnité. Mais voilà, cette double condition d’une juste et préalable indemnité fait obstacle à une prise de possession rapide.

Pour contourner cet obstacle la LOI n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 prévoit le recours à la procédure d’expropriation en extrême urgence.  Quèsaco ? La procédure d’extrême urgence est prévue dans le code de l’expropriation dans des hypothèses très restreintes : construction de grandes infrastructures de transport et sous la triple condition 1) qu’il s’agisse de terrains non bâtis, 2) que se présentent de difficultés de prise de possession et 3) que cette prise de possession soit décidée par décret en Conseil d’Etat.

Cette procédure prévoit, en dérogation à l’article 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, que la prise de possession peut intervenir avec le paiement d’une provision fixée par l’administration.  L’indemnité n’est donc pas fixée par le Juge, elle n’est donc pas juste et préalable puisque la provision est versée selon l’appréciation de l’administration.

En contrepartie de cette prise de possession en extrême urgence, une indemnité spécifique peut être demandée au juge.

La Loi 2018-202 sur les JO 2024 franchit cependant un pas supplémentaire par rapport au code de l’expropriation. Elle permet l’expropriation en extrême urgence de terrains bâtis ! Donc d’habitations, de commerces, d’entreprises etc. Et c’est d’ailleurs sur invitation du Conseil d’Etat que cette Loi va plus loin que le code de l’expropriation (voir l’avis du Conseil d’Etat sur ce point) en permettant d’exproprier des constructions !

Le Conseil constitutionnel dans sa décision 89-56 du 25 juillet 1989 avait pourtant semblé restreindre l’usage de la procédure d’extrême urgence aux terrains non bâtis. La loi sur les JO 2024 pourrait donc être contestée sur ce point : sa constitutionnalité fait question.

Conseils :

  1. Ne jamais négocier seul avec l’administration. La signature d’accords avec l’administration aboutit en général à la prise en charge de vos frais d’avocat. Il convient donc, dans les démarches amiables, d’être accompagné par un avocat. L’avocat vous garantira par la rédaction d’un protocole d’accord la protection juridique de votre situation.
  2. Présentée par l’administration comme une éventualité funeste pour l’exproprié, le juge se trouve au contraire dans la position impartiale d’indemniser justement l’exproprié. Et il le fait. Lorsqu’aidé par un avocat connaissant la procédure, vous exposez clairement au juge de l’expropriation tous vos préjudices et présentez les termes de référence adéquats, vous obtenez une indemnisation juste. Soulignons que la procédure d’extrême urgence ne met pas fin à la procédure classique dans laquelle c’est le juge qui fixe in fine la juste indemnité. Il convient donc de saisir le juge pour obtenir une juste indemnité après versement de la provision.
  3. Ne pas se contenter des indemnités provisoires. En plus des indemnités habituelles en expropriation (qui sont assez nombreuses et variables selon le type de bien exproprié), s’ajoute une indemnité spécifique pour la prise de possession en extrême urgence. Pour les habitations on pense par exemple aux frais de relogement temporaires : hôtels, locations, frais de transport, de scolarité etc. occasionnés par une prise de possession qui n’a pas donné à l’exproprié le temps de chercher un nouveau logement, changer d’école pour ses enfants etc. Pour les entreprises, tous les frais occasionnés par la perte rapide d’un outil de travail et la nécessité en urgence de trouver des solutions : perte de clientèle, location de bâtiments, bureaux équivalents, frais de transport des salariés etc.
  4. Rappelons que les frais d’avocats sont pris en charge par l’expropriant selon le code de l’expropriation.